Photo Rabière

Interview Caroline Bruzulier

L : Bonjour, tout d’abord, qui êtes-vous ?
C : Eh bien, je suis Caroline Bruzulier, j’ai travaillé pendant 33 ans au Centre social de la Rabière. J’y ai travaillé sur un service qui s’appelle le Point Relais Emploi Formation. J’ai longtemps accompagné des personnes du quartier dans leur recherche d’emploi, puis je me suis occupée de la gestion du service, ensuite de l’organisation et de la gestion du projet social, du Centre Social. Et puis, pour finir, j’ai travaillé sur l’ensemble du secteur adulte du Centre Social.
L : Pouvez-vous nous raconter un de vos souvenirs sur le quartier de la Rabière avec ses habitants ?
C : Alors, un souvenir qui m’est très précieux, c’est peut-être pas par hasard que j’en parle aujourd’hui parce que c’est un souvenir de beau temps, donc ça n’est pas sans intérêt dans la période de pluie qu’on traverse. Nous avions organisé, sur la place devant l’église de la Rabière, un forum sur l’emploi dans le cadre duquel on avait donc fait venir tout un tas de partenaires qui parlaient un peu de leur propre façon d’accompagner les chercheurs d’emploi. On avait fait venir deux clowns qui participaient aussi un peu à l’animation de l’espace. Et en fait, on a vécu une journée, parce que c’était sur la journée, une journée particulièrement heureuse, alors d’abord en animation, ensuite en ambiance, il y avait quelque chose de très chaleureux, de très détendu. On a rencontré énormément d’habitants alors qu’on est plutôt un petit service et que pour le coup on ne s’était pas, je crois qu’on était autour de 150 personnes
sur cette manifestation, mais parce qu’on est resté assez tard, donc on a croisé les parents en entrant de l’école, on a croisé les gens qui faisaient leurs courses dans la journée. Et en fait, le monde attirant le monde, des gens sont venus juste parce qu’il y avait de la lumière et qu’est-ce qui se passe ici. Et du coup, c’est un souvenir assez chouette d’une expérience de vie dans la rue, devant le centre social et avec les habitants.
L : Quand je vous dis « /Mémoire d’un paysage urbain », que cela vous évoque-t-il par rapport à la transformation du quartier ?
C : Alors, je dirais que moi j’ai connu le quartier de la Rabière, donc je suis arrivée en 1989 sur le quartier de la Rabière, pour en partir en 2023. Et donc, ce qui m’a énormément marqué en 89, même si je connaissais un peu parce que je pouvais le traverser ou des choses comme ça, c’était un quartier extrêmement bétonné, que je trouvais assez un peu triste dans ces rues, même s’il y avait déjà quelques arbres, etc. On voyait tout de suite qu’on était dans un quartier d’habitat social, et je trouvais que globalement, les bâtiments n’avaient pas un aspect ni chaleureux, ni agréable, ni plaisant. Et puis, dans le cadre de l’ANRU, parce qu’à l’époque ce n’était pas encore le NPRU, dans le cadre de l’ANRU, il y a eu un gros gros travail de résidentialisation des halls d’entrée. Et là, je trouve qu’il s’est passé quelque chose, parce que, alors même si tout n’était pas positif, parce qu’il y a eu une envie de faire du beau, et de faire du beau là où d’habitude, on s’attend plutôt à faire de l’utilitaire et du pratique. Donc on a décidé, alors je dis on, ce n’est pas moi du tout, l’ANRU a décidé d’agrémenter les entrées d’immeubles, d’y mettre des arbres un peu exotiques,
de faire des choses vraiment très esthétiques. Et pour le coup, je crois que ça change l’image qu’on peut se faire du quartier quand on le traverse, ça change aussi la sensation qu’ont les personnes qui y vivent, même si ça n’a pas d’impact direct, évidemment, sur la qualité de vie des gens, il y a quand même, je trouve, une reconnaissance de l’autre dans l’envie de le faire vivre dans des espaces agréables. Donc ça, pour moi, ça a été une étape hyper importante,
et puis elle s’est accompagnée à diverses périodes de destruction de parties d’immeubles, etc, qui ont apporté aussi de l’air et un autre type de visibilité de circulation que j’ai trouvé fort intéressant. Après, voilà, c’est une partie des choses parce que la résidentialisation, elle n’était pas tellement adaptée au rythme de vie des habitants qu’on aurait peut-être aimé des bancs pour s’y asseoir, des espaces de jeux pour les enfants, etc. Mais en tout cas, il y a eu quelque chose là de la volonté de donner du beau à tout le monde que j’ai trouvé riche.
L : Merci beaucoup Caroline.
C : Merci Lucie.

Années 1960 à 1980